Cocteau/Glass/Ménard : tiercé gagnant

Fasciné par l'oeuvre de Cocteau qui traverse autant les enjeux de l'adolescence, de l'amour et du genre, Philip Glass en tire une partition et un livret fortement imprégné du film de Jean-Pierre Melville et porté sur scène avec chanteurs et danseurs par Susan Marshall. Phia Ménard choisit de tirer l'ensemble vers l'opéra, inscrivant le mouvement au plateau pour donner corps aux échanges entre Elizabeth et son frère Paul. A la lancinante répétitivité des plages de Glass, elle fait répondre le glissement des ados dans des corps âgés et offre à l'oeuvre des chocs profonds. La claustration des seniors dans les EHPAD répond à celle des enfants dans leur chambre.

Ingénieuse, la scénographie met aussi les instruments en mouvement pour répondre au trio de personnages et contrebalancer l'alternance des chants et des mots. Conjuguant talent vocal, composition virtuose, mise en scène envoûtante et texte fort, Les enfant terribles version 2022 combinent le savoir-faire d'Emmanuel Olivier (à la direction musicale), de Phia Ménard et de leur équipe artistique de la meilleure des manières. Un parfait exemple d'une démarche globale qui voit le fond et la forme se répondre pour faire écho à un texte centenaire mais diablement actuel.