Star montante du music hall, Valentino Liberace attire le regard de Scott Thorson. Traîné dans les loges par un ami commun, Scott tombe sous le charme du personnage, charismatique en diable. Un homme à qui on ne pouvait rien refuser, sur scène et dans la vie. Le jeune Scott (Matt Damon) qui entre dans la sienne en prince va l'apprendre à ses dépens. Diffusé aux Etats-Unis sur la chaîne câblée HBO, après qu'aucun distributeur n'ait accepté de sortir le film au cinéma de par son caractère sulfureux, Ma vie avec Liberace, dernier (et ultime) film de Steven Soderbergh (c'est lui qui le dit), dévoile un Michael Douglas métamorphosé en pianiste virtuose et fantasque.

Avec un personnage dont chacune des apparitions confine à la théâtralité, le biopic se devait de jouer la carte de l'excès et paraître ouvertement outrancier... mais sans tomber dans les travers de la caricature du show gay en costumes et froufrous. Car si côté pile, Liberace faisait craquer ces dames, côté face, il entretenait des relations passionnées et exclusives avec les hommes. Une vie éprise de liberté qui va pourtant le condamner. Soderbergh scrute le personnage jusque dans ses aspérités avec le soin d'un biographe et un regard d'esthète, sans afficher la couleur de sa mise en scène habituelle. Plus classique dans la forme, Ma vie avec Liberace parvient à faire rire sans trop en faire, à émouvoir avec sincérité, justement puisque le cinéaste filme ses personnages excessifs à hauteur d'homme, jusque dans leurs errements. Le pouvoir d'attractivité exercé par Liberace sur Thorson y est fascinant : même en devenant un repoussoir, il revient inexorablement vers lui. Une galerie de seconds rôles aux qualités toutes aussi comparables (Dan Aykroyd en manager de la star, Rob Lowe en chirurgien esthétique) complète le tableau qui nous fait déjà regretter le cinéaste retraité. A moins que...