Les hauts de hurlement

Les TV Ghost devaient s’ennuyer ferme en Indiana et cela s’entend dans leurs frénésies soniques. À première ouïe, on pourrait croire à un savant assemblage de no-wave et de rockabilly, soit le corps de DNA avec la tête des Cramps et les cicatrices turgescentes de Suicide. Rythmiques implacables sur lesquelles une fuzz acérée se casse les dents, voix d’outre-tombe, façon enterré vivant. TV Ghost ne comptent pas fleurette aux chrysanthèmes mais jouent les esprits frappeurs, cogneurs même. Camisolé par la basse et la batterie, l’auditeur n’a plus qu’à se laisser ouvrager par la petite roulette de la guitare, les hurlements du chanteur couvriront les vôtres. C’est bien connu, dans un concert de ce type, personne ne vous entendra crier. C’est donc du sévère mais pas du brutal puisque sous la douleur, on sent poindre le concept : un mur du son prompt aux lamentations, un blues cradingue oscillant vers un bruit blanc gaussien amplifié par les forges de chez In The Red, label rouge des péteurs de tympans. À noter la présence des Crusaders Of Love en première partie, très bon combo rock lillois sur qui l’on pourra compter pour rendre hommage à Alex Chilton .

Avec les poètes britanniques de Fuck Buttons, on reste chez les accros aux accrocs sonores, mais à dominante électro cette fois. Ici aussi, on équarrit les esgourdes, on oxyde chaque note, on canarde les mélodies. Mais là encore le tempo tient la barre , si bien que, finalement, tout ce raffût n’est qu’enluminure à une sorte de big-beat sauce glitch-noise, aux démarrages ambient et aux apogées bruitistes. Ultra efficace, la musique de Fuck Buttons a déjà acquis une considérable audience , grâce notamment à la production d’Andrew Weatherall sur leur dernier album. Leur concert au festival Ground Zero de Lille cet automne fut rapidement complet, il ne faut donc pas tarder à assister à l’explosion annoncée de ce groupe qui réconcilie mainstream et contre-courant. Avant garde et musiques extrêmes sont livrées en pâture dans l’arène du dancefloor pour une vision paroxystique de la dance music anglaise, petit bidon lads compris.