1921. Immigrée polonaise, Ewa (Marion Cotillard) est arrivée à Ellis Island avec sa sœur malade. Séparés à leur arrivée, Ewa pense trouver son salut en Bruno (Joaquin Phoenix). Mais l'homme généreux en apparences cache un souteneur qui va la prendre sous son aile. Pour réunir la somme nécessaire pour retrouver sa sœur, elle cède à la prostitution... En mêlant enjeux familiaux et cruauté des bas-fonds, le réalisateur de Two Lovers n'abandonne pas ses thèmes de prédilections mais s’attelle cette fois à un projet beaucoup plus personnel puisque le sujet du film renvoie à la fuite migratoire vécue par propre sa famille. Hasard ou non d'un profond attachement au sujet, James Gray signe un mélodrame trop corseté dans sa narration.

L'histoire dans l'Histoire, c'est celle d'un triangle amoureux entre la rescapée qui cherche le salut (Marion Cotillard) et deux rivaux écorchés vifs, Joaquin Phoenix (vénéneux, versatile) et Jeremy Renner (qui témoigne d'une présence éclatante en peu de scènes). Choix numéro 1 de Gray pour incarner la figure centrale de son film, Marion Cotillard, appliquée et sobre, trouve un personnage à sa mesure, avec force de caractère et détermination qu'elle sert à la perfection. Mais étrangement, l'impact émotionnel semble loin de Two Lovers ou de La nuit nous Appartient. Mélodrame racé et lumineux ou rien ne dépasse, sublimé par la photographie somptueuse de Darius Khondji, The Immigrant, pure création « James Gray », manque réellement de foisonnement dans ses enjeux amoureux. Traversé de fulgurances (l'entrée en scène de Jeremy Renner, presque irréelle, les faces à faces nerveux entre les deux hommes, une fuite désespérée baignée de lumière dans un souterrain...), le film se referme au bout de deux heures sur un plan symétrique d'une poésie rare. La signature d'un maître, auteur d'un tableau qui fini par laisser une sensation de manque.