Envoyé sur le front pendant la Seconde Guerre Mondiale, Jimmy Picard (Benicio Del Toro) s'est sérieusement blessé à la tête. En convalescence chez sa sœur, il subit de violents maux de crâne et de graves troubles de la vision. Admis dans un centre spécialisé dans les maladies du cerveau, les plus grands se penchent sur son cas, mais aucun avis ne s'avère concluant. Un psy renommé, Georges Devereux (Mathieu Amalric) est dépêché sur place pour tenter de percer le mystère. Les conversations nourries entre les deux hommes vont jouer un rôle cathartique.

Le duo d'acteurs fait la grande force du film : totalement investis par leurs rôles, les comédiens excellent. Benicio Del Toro, hagard et mystérieux, semble transformé. Ce n'est pas le seul. Pour la première fois de sa carrière, Arnaud Desplechin plante sa caméra en Amérique, pour raconter cette histoire inspirée de faits réels consignés dans l'analyse véritable du psychiatre dépeint dans le film. Les grands espaces font le plus grand bien au cinéaste qui les utilise pour déployer toute la langueur d'un récit bien troussé au climat de Far West et où plane l'ombre de John Ford. Appliqué, didactique, Desplechin déroule son récit avec précision. Les échanges se révèlent passionnants et empreints d'une mélancolie que font ressortir avec brio des flashbacks évanescents, la partition d'Howard Shore épousant judicieusement cet ensemble. Même si, sur un sujet pareil, sortir des sentiers battus aurait pu procurer au film le coup de fouet nécessaire pour casser une rythmique traînante qui surprendra les spectateurs rompus à la filmographie « desplechienne ». Mais qu'importe puisque l'harmonie, elle, est bien là.